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14 janvier 2021 4 14 /01 /janvier /2021 16:14
 
Tout le monde berbère célèbre Yennayer dans la joie et l’allégresse faite autour de ce retour à l'enracinement dans la tradition de nos aïeux.Calendrier sans date et d'abord agricole, populaire et paysan, fait d'observance sécularisée de rites symboliques et incantatoires,voire magiques (voir les travaux de pierre Bourdieu dans "symbolisme de la maison kabyle"...etc), cet anniversaire qui coïncide avec le solstice d’hiver a des origines qui se perdent dans les brumes immémoriales du passe lointain Nord-Africain et, peut-être même, au-delà et s'abreuve à une mythologie païenne qui a sévi pendant des lustres de millénaires d'ignorance.
Le pays berbère englué dans l’ostracisme historique de son identité bafouée y trouve là un formidable motif de fierté et s’emploie à célébrer avec éclat ce motif identitaire qui renforce son existence politique et s’ajoute aux acquis engrangés après des luttes à l’actif de générations entières de militants berbéristes invétérés..
Mais au-delà de cette «légitimité», nous ne devons pas perdre de vue que la vision du monde imposée à notre odyssée et qui avait porté notre déni, continue présentement de sévir et de nous aliéner:
ZZin am leqrun am leqyud/Kksen am lem3ahda n tlalit.
Seffden wallaghen tcudd/Kennun i targit taklit.
Tilin ma s wiyid labudd/Ernu amezruy zeglit.
(Extrait des paroles d une chanson des Frères Haddag)
Pauvre monde berbère dont l'histoire a été tenue à la lisière du monde et loin de la civilisation des hommes pendant très longtemps et sans avoir pu construire, à l'instar d'autres peuples du monde, sa cite politique ! Les noms berbères prestigieux dont notre honneur se gargarise aujourd'hui - Saint Augustin,Apulee,Fronton...etc.,c'était en latin qu'il s'étaient distingués et non dans leur langue maternelle. Nous n'aurions même pas connu le grand Jughurta s'il n'avait pas été cité par Salluste dans "Bellum Jughurtinum" (la Guerre de Jughurta contre Rome).
Nous aurions aimé que le nom de l’ illustre Jughurta fût parvenu jusqu à nous par le fait d’une mémoire commune entretenue et par une transmissio trans générationnelle. Que nenni ! Le nom de notre valeureux roi nous était livré par ceux là-mêmes
mêmes qui l’avaient tué.Nous rappelons que Jughurta était emprisonné dans une geôle de Rome suite à la trahison de son beau frère Bocchus et il est difficile de croire que les Romains l’y aient sauvagement laissé croupir en le privant de nourriture.
Il est un oiseau qui ne chante que juste avant de mourir: le cygne. Le chant du cygne a-t-il, donc, été entamé? A-t-on définitivement consomme le hiatus qu'il y a entre nous et notre proche ancestralité ? Serions nous en train de construire et de nous inventer une autre identité? Je connais des Kabyles qui se seraient bien inventés une ascendance Gréco latine.
Nous le craignons. Sur un plan anthropologique, on est sûrement bien fondé à le penser. On est en face d'un monde traditionnel débusqué de ses cohérences internes et qui n'a pas su secréter une modernité endogène, qui serait capable de contenir les outputs occidentalo-centristes apportes par les vents mauvais de l'histoire et entrés violemment et frontalement sous-couvert d'une modernité allogène et exclusiviste, qui ne se définit qu'en excluant l'autre, cet autre qui n'est appréhendé que comme subordonné, comme auxiliaire ou adversaire à réduire. Elle le ravale vers un statut inférieur, vers un état de subculture au sein de laquelle l'acquisition, à corps perdu, des moyens didactiques permettant une grille de lecture univoque de l'histoire et du monde est imposée suivant un langage tutélaire, répétitif et injonctif par les tenants du discours et de la doxa dominante, et est vécue comme un accessit voire comme un hochet distinctif d'émancipation et de "supériorité, un "accessit" qui se traduit, en réalité, comme un... surcroît d'aliénation.
Je m'en fous du Nouvel An chinois comme de l'An 40. D'autres s'y intéresseront. Ce qui m'intéresse,et c'est l’objet de ma publication,ce sont les fondements anthropologiques de notre culture. All right? Qui d'incohérences? Sans la connaissance profonde des ressorts psychosociaux qui expliquent notre comportement socioculturel,il est impossible de comprendre nos échecs sociopolitiques historiquement auto reproductifs. Il est vain de gloser à longueur de colonnes sur des slogans de changements politiques, quand les freins à ces changements sont consubstantiels des solutions préconisées.
Quand comprendrions-nous que nos problèmes de sous-développement sont d'abord culturels??? La Révolution industrielle était née au XVIII ème siècle et avait embrassé rapidement toute l'Europe jusqu'à Vladivostok,extrême Orient de la Russie, telle une tâche d'huile.Il lui suffisait simplement de traverser ce "fleuve" de la Méditerranée pour nous parvenir. Ce ne fut jamais fait et ne fut jamais arrivée !!! Les freins étaient culturels…
Nous nous enorgueillissons de tous ceux qui avaient fait honneur à la culture qui les avait accueillis,LA CULTURE LATINE, notamment, mais si Saint Augustin était le philosophe de l'église chrétienne, nous regrettons que la culture kabyle n'avait pas porté sa pensée et pas plus qu elle n’ait . porté celle d Ibn Khaldoun ou du grand commentateur d’Aristote qu’était le grand Averroes. Tout notre problème était et est encore là, précisément…
Dans un monde qui se meurt, on n’est pas encore venu au monde, pour paraphraser Kateb Yacine (universel, lui) !!! Et venir au monde, exister, ne peut se faire sans l’effort soutenu en perspective de la définition de soi cohérent, de sa cohésion , de sa reconnaissance en tant que tel et d’acquisition de la connaissance et du savoir-faire. En tout domaine. Exister, c’est rattraper les Autres et, pourquoi pas les dépasser un jour, le rêve est permis et le génie berbère existe bel et bien. EXISTER, c’est PARTICIPER A LA DÉFINITION DE L’UNIVERSEL ( A HAUTEUR DE CEUX QUI NOUS L'INTERDISENT,AUJOURD'HUI) ET A SA CONSTRUCTION CAR ON NE NAÎT PAS DE L’INDULGENCE DES AUTRES, MAIS DE SA PROPRE DIFFÉRENCE, DE SA PROPRE LUMIÈRE. Tout le reste ne mérite même pas un regard…Bonne année, quand même.
Mohand Améziane Haddag
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